Husserl émerge dans une Allemagne en pleine transformation, marquée par l'industrialisation et l'unification politique. L'époque est caractérisée par la montée du nationalisme, les tensions internationales menant à la Première Guerre mondiale, et une crise des valeurs et des sciences qui influence particulièrement sa pensée tardive, notamment dans sa "Conférence de Vienne" (1935) et "La Crise des sciences européennes".
Sa pensée se développe dans un contexte philosophique dominé par le positivisme, le scientisme et le psychologisme en logique. Influencé initialement par Franz Brentano et le concept d'intentionnalité de la conscience, il évolue à travers plusieurs phases : depuis une approche psychologiste dans sa "Philosophie de l'arithmétique" (1891), il opère un tournant anti-psychologiste avec les "Recherches logiques" (1900-1901), avant d'élaborer sa phénoménologie transcendantale dans les "Idées directrices" (1913).
La phénoménologie husserlienne se caractérise par une attention particulière à la conscience intentionnelle et à la méthode de la réduction phénoménologique, visant à mettre entre parenthèses la thèse de l'existence du monde pour étudier les phénomènes tels qu'ils apparaissent à la conscience.
Cette approche, qui cherche à fonder rigoureusement les conditions de la connaissance scientifique, pose les bases du mouvement phénoménologique qui marque profondément la pensée du 20e siècle.
"Toute conscience est conscience de quelque chose."
— conscienceAvec Descartes on savait que l'homme est une chose pensante, Cogito ergo sum. Et bien Husserl rajoute : chose pensante, consciente. Mais pas conscience pure, nue, vide de tout contenu. Chaque instant, on est orienté vers une chose, un projet, une action. La conscience est toujours orientée vers son action, elle est toujours "conscience-de". Ainsi, tout acte de conscience implique la conscience de quelque chose.
Tout acte de conscience est intentionnel
L'intentionnalité vise toujours un objet
Donc la conscience est nécessairement relationnelle
La science objective oublie le vécu
Il faut retrouver l'expérience originaire
Donc la raison doit être phénoménologique
La conscience retient et protend
Ce flux constitue la temporalité
Donc le temps est intentionnel
L'évidence est intuition de l'essence
Cette intuition donne la vérité
Donc la vérité est évidente
Le passé et futur habitent le présent
Cette fusion est la temporalité
Donc le temps est vécu
« La vie quotidienne, pour ses fins variables et relatives, peut se contenter d'évidences et de vérités relatives. La science, elle, veut des vérités variables une fois pour toutes et pour tous, définitives, et donc des vérifications nouvelles et ultimes. Si, en fait, comme elle-même doit finir par s'en convaincre, la science ne réussit pas à édifier un système de vérités absolues, si elle doit sans arrêt modifier les vérités acquises, elle obéit cependant à l'idée de vérité absolue, de vérité scientifique, et elle tend par là vers un horizon infini d'approximations qui convergent toutes vers cette idée. A l'aide de ces approximations, elle croit pouvoir dépasser la conscience naïve et aussi se dépasser infiniment elle-même. Elle croit le pouvoir aussi par la fin qu'elle se pose, à savoir l'universalité systématique de la connaissance. »
Husserl
La science recherche des vérités absolues définitives.
« La vérité ou la fausseté, la critique et l'adéquation critique à des données évidentes, voilà autant de thèmes banals qui déjà jouent sans cesse dans la vie pré-scientifique. La vie quotidienne, pour ses fins variables et relatives, peut se contenter d'évidences et de vérités relatives. La science, elle, veut des vérités valables une fois pour toutes et pour tous, définitives, et, partant, des vérifications nouvelles et ultimes. Si, en fait, comme elle-même doit finir par s'en convaincre, la science ne réussit pas à édifier un système de vérités “absolues”, si elle doit sans arrêt modifier les vérités acquises, elle obéit cependant à l'idée de vérité absolue, de vérité scientifique, et elle tend par là vers un horizon infini d'approximations qui convergent toutes vers cette idée. A l'aide de ces approximations, elle croit pouvoir dépasser la connaissance naïve et aussi se dépasser infiniment elle-même. Elle croit le pouvoir aussi par la fin qu'elle pose, à savoir l'universalité systématique de la connaissance. »
Husserl
La science cherche à édifier des vérités absolues valables pour tous.
« Pour la vie quotidienne, dont les buts sont changeants et relatifs, des évidences et des vérités relatives suffisent. Mais la science cherche des vérités qui sont et restent valables une fois pour toutes, qui sont et doivent rester valables pour tous, elle cherche, par conséquent, des vérifications originales et radicales. Si, comme elle doit elle-même finir par le reconnaître, la science ne parvient pas en fait à réaliser un système de vérités absolues, et si elle est contrainte de modifier sans cesse ses vérités, elle n'en obéit pas moins à l'idée d'une vérité absolue ou rigoureusement attestée, et elle vit donc dans un horizon infini d'approximations qui convergent vers cette idée. Grâce à ces approximations, elle croit pouvoir infiniment dépasser la connaissance naïve et ainsi se dépasser elle-même. »
Husserl, Méditations cartésiennes
La science cherche des vérités absolues et universelles.
« En règle générale, ce n'est pas l'artiste exécutant qui peut donner une juste information sur les principes de son art. Il ne crée pas d'après des principes et n'évalue pas d'après des principes. En créant, il obéit à l'impulsion spontanée de ses facultés harmonieusement cultivées et, en jugeant, à la finesse de son intuition et de son sens artistiques. Or, il n'en est pas seulement ainsi dans le cas des beaux-arts, auxquels on a pu penser tout d'abord, mais pour tous les arts en général, en prenant ce mot dans son sens le plus large. Il en est, par conséquent, aussi de même pour les activités de la création scientifique et l'évaluation théorique de ses résultats, des fondations scientifiques de faits, de lois, de théories. Le mathématicien, le physicien, l'astronome eux-mêmes n'ont pas besoin, pour mener à bien leurs travaux scientifiques les plus importants, d'accéder à l'évidence intellectuelle des ultimes fondements de leur activité et, bien que les résultats obtenus possèdent, pour eux et pour d'autres, la force d'une conviction rationnelle, ils ne peuvent cependant pas élever la prétention d'avoir prouvé, pour tous les cas, les ultimes prémisses (1) de leurs conclusions, ni recherché les principes sur lesquels repose la validité de leurs méthodes. Or, c'est à cela que tient l'état d'imperfection de toutes les sciences. »
Husserl, Recherches logiques
En règle générale, ce n'est pas l'artiste exécutant qui peut donner une juste information sur les principes de son art.